de Keisuke Shigao » Mer Déc 30, 2009 9:48 pm
Keisuke… dérivait. Il était tel un fétu de paille se retrouvant au cœur d’un ouragan de douleur et de rage. Douleur, de voir la souffrance de son amour, de le voir s’écarter de lui. Rage, d’imaginer le pire, d’imaginer qu’un être ait pu un jour poser un doigt sur Oyuki avec des intentions malveillantes. Cette idée l’emplissait d’une haine sans nom. Les pulsions meurtrières qui l’avaient envahi à la mort de sa famille refaisaient surface, menaçant de briser l’équilibre psychologique qu’il maintenait depuis ce jour fatidique. Il sentit une violente brûlure dans le dos mais l’ignora. Néanmoins, cela l’aida à garder le contrôle de lui-même. Son nouveau tatouage remplissait sa tâche à la perfection, apparemment.
Les mots d’Oyuki cependant éteignirent sa rage aussi facilement qu’un souffle d’air éteint la flamme d’une bougie. Un soulagement sans nom l’envahit quand Oyuki lui dit qu’il n’avait pas été violé. Du soulagement… et une grande perplexité quant au reste des paroles du voleur. Ses griffes se rétractèrent, laissant ses mains retrouver leur apparence humaine, et ses yeux redevinrent également normaux, tandis qu’il plongeait un regard perdu dans celui d’Oyuki. Il ne comprenait pas. Si le problème ne venait pas de sa nature de dragon. Si personne n’avait souillé Oyuki… alors pourquoi ? Pourquoi le brun s’estimait-il indigne de lui ?
Finalement, Oyuki lui fournit un semblant de réponse, et l’esprit perturbé et affolé de Keisuke mit un peu de temps à assembler tous les éléments. Et quand finalement la lumière se fit et qu’il comprit où se situait le réel problème, il crut s’évanouir de soulagement. Pas que l’angoisse de son amour ne représentait rien, loin de là. Mais il avait craint autre chose. Quelque chose contre quoi il ne pourrait rien. Mais là… il y avait encore un peu d’espoir… Alors il laissa Oyuki vider son sac, sentant qu’il en avait besoin. Son cœur se serra douloureusement en voyant ses larmes, et il se retint à grand peine de le prendre dans ses bras. Il devait le laisser finir, exprimer tout ce qu’il avait sur le cœur. Il se fit violence pour ne pas fondre sur son voleur quand ce dernier l’embrassa doucement, douloureusement.
Et puis finalement, alors qu’Oyuki se détournait de lui, Keisuke se décida à intervenir. Son cœur ne pourrait le supporter plus longtemps. Sans mouvement brusque, et le tout avec une extrême douceur, il leva la main, pour la poser gentiment mais fermement sur la joue de son amant.
« Oyuki… regarde-moi… »
Il avait mit toute la douceur et toute la tendresse dont il était capable dans sa voix. Et doucement, mais fermement, il obligea le visage du brun à se tourner vers lui. Il essaya ensuite de capter le regard de son compagnon, et lorsque leurs yeux se croisèrent, à travers le voile liquide qui s’écoulaient de ceux d’Oyuki, le dragon continua.
« Oyuki, je t’en prie, écoute moi. Ce que je vais te dire est très important. Quand on s’est rencontré, j’était un être solitaire et malheureux, malgré le masque souriant que je portais depuis très longtemps. Je m’étais résigné à devoir continuer à mener une vie vide et sans saveur. Non pas que je n’appréciais pas mon travail et le monde qui m’entourait. Mais il y avait un grand vide que je ne parvenais pas à remplir… »
Il s’interrompit un moment, cherchant à rassembler les mots les plus justes, tout en veillant à garde rune voix calme et apaisante. Il n’avait jamais été doué pour les déclarations, mais là, il allait devoir faire un effort. Il n’avait pas le droit à l’erreur. S’il échouait… Si Oyuki le quittait… Il ne s’en remettrait peut être jamais réellement.
« Et puis tu es entré dans ma vie. Source de curiosité et d’amusement, au départ. Et puis petit à petit, sans vraiment que je ne m’en aperçoive, je me suis attaché à toi. Je t’ai fait entrer dans mon monde, là où personne n’avait réussi à pénétrer depuis de très, très nombreuses années. Je pensais… ne plus pouvoir éprouver du bonheur à nouveau, et pourtant… Pourtant quand je suis avec toi, je n’ai pas à feindre la gaîté, la bonne humeur ou toute chose du même genre… Quand je suis avec toi, j’ai l’impression de revivre, après des siècles d’agonie. Aujourd’hui, dans tes bras, j’ai été le dragon le plus heureux du monde. N’en doute à aucun instant.»
Il avala péniblement sa salive et étira un léger sourire empli de tendresse. Il lui était difficile de soutenir le regard d’Oyuki, comme cela, mais il devait le faire. Jusqu’au bout.
« Tu me dis que tu ne peux pas être avec moi à cause de ton passé, à cause des cicatrices que tu portes… Parce que tu estimes ne pas me mériter. Ce qui est complètement stupide. Oyuki… je t’ai raconté mon histoire. Tu sais ce que j’ai fait par le passé. Tu as vu de tes propres yeux quel monstre je peux être… J’ai plus de sang sur les mains que tu ne pourras jamais en avoir… J’ai fait des choses horribles. Vraiment horribles. Je suis un monstre. Et pourtant… Pourtant, tu m’as regardé, tu m’a touché sans peur, sans dégoût, sans voir en moi un monstre sanguinaire et immonde. Tu ne peux pas savoir à quel point cela a apaisé mon cœur… »
Il se pencha doucement et posa son front contre celui de son compagnon, sa main toujours sur sa joue et son regard ancré dans celui d’Oyuki.
« Tu te trouves immonde, sale et je ne sais quoi d’autre encore… Mais ce n’est pas ainsi que je te vois, moi… peu importe ton nom, que ce soit le tien ou non, peu m’importe les marques que tu peux avoir sur le corps. Peu m’importe ce que tu as fait par le passé… la seule chose qui m’importe, la seule chose que je vois, c’est l’homme que tu es aujourd’hui, somme de toutes tes actions passées et présentes… Et c’est cet homme que j’… »
Les mots se bloquèrent dans sa gorge. Il avait tellement envie de les dires, mais tellement peur aussi. Il ferma un instant les yeux avant de les rouvrir, restaurant le lien visuel.
« Nous avons tous nos propres démons qui rongent nos âmes. Il faut juste trouver quelqu’un qui peut nous aider à les exorciser. Laisse-moi t’aider, Oyuki… Laisse moi t’aider à exorciser les démons qui te rongent… Laisse moi essayer d’apaiser les douleurs qui te torture de l’intérieur… Si les cicatrices que tu portes sur ton corps marquent ton âme, alors je trouverais un moyen de les faire disparaître. Je ne suis pas vraiment un dragon médecin, mais je suis l’un des plus puissants enchanteurs du royaume. Je trouverais un moyen de les faire disparaître, même si je dois travailler jour et nuit sans relâche pour perfectionner mon sort… je ferrais tout ce qui sera en mon pouvoir pour toi… Alors s’il te plait… je t’en prie… »
Sa voix se brisa sur la fin et une voile humide commença à s’abattre devant ses yeux, tandis qu’il se força à souffler les derniers mots.
« … ne me laisse pas… Je t’en supplie, ne m’abandonne pas… »
Un bouclier pour se protéger... et une arme à double tranchant pour tromper les autres... Voilà le sourire dont je me suis paré...
Hyuuu !!! J'ai dis quelque chose de profond, là !!! ^^